Sans aucun doute, beaucoup de personnes croyent sincèrement que les hommes ainsi torturés et réduits à la taille de nains sont tels que leur créateur les voulait ; tout comme beaucoup de gens ont cru que les arbres étaient bien plus beaux, taillés en boules ou en formes d’animaux, que laissés dans leur état naturel. Mais si cela fait partie de la religion, de croire que l’homme a été créé par un être bon, il est en harmonie avec cette croyance de penser que cet être a donné les facultés humaines pour qu’elles soient cultivées et développées, et non pour qu’on les détruise et qu’on les déracine. Il est raisonnable d’imaginer qu’il se réjouit, toutes les fois que ses créatures font un pas vers l’idéal dont elles portent en elles la conception, toutes les fois qu’elles augmentent une de leurs facultés de compréhension, d’action ou de jouissance. Voilà un type de perfection humaine bien différent du type calviniste : on suppose ici que l’humanité ne reçoit pas sa nature pour en faire tout aussitôt abnégation. La revendication de soi-même des païens est un des éléments du mérite humain, aussi bien que l’oubli de soi-même des chrétiens [1]. Il y a un idéal grec de développement de soi-même, auquel se mêle, sans le remplacer, l’idéal platonique et chrétien d’empire sur soi-même. Ce peut être mieux d’être
- ↑ Essais de Sterling.