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autres lois que les besoins changeants et indéfinissables dont se compose la vie de chaque société. C’est au Droit à suivre pas à pas la Vie, la disciplinant ou l’exaltant, selon qu’elle fait défaut ou excès.

Non, il n’y a pas là de définition possible. Heureusement qu’une définition scientifique n’est pas nécessaire. Nulle société ne tiendrait ici-bas, si la science lui était indispensable. La science et la vertu sont des transcendances dont les hommes n’éprouvent pas un besoin absolu. Ainsi, en chaque pays, en chaque question on peut faire une part équitable au règlement et à la liberté, sans posséder la philosophie de cette distinction, sans en démêler les éléments supérieurs. C’est merveille de voir comme le train ordinaire des choses, les me- sures de gouvernement et la législation elle-même savent se passer d’axiomes et de rigueur scientifique. Ce spectacle est ancien et consolant. Qui est-ce qui sait la théorie de la valeur parmi tant de gens qui font des échanges, et même parmi les économistes, qui n’ont garde de s’entendre sur ce sujet ? Quant au législateur, en France, il a fait un code pénal où la raison théorique brille par son absence, où apparaissent gravement des définitions dans le goût que voici : L’infraction que les lois punissent de peines afflictives ou infamantes est un crime. L’infraction qu’elles punissent de peines correctionnelles, est