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ceux qu’il n’a jamais cessé de regarder comme dignes de persécution [1].

Car il en est ainsi, ce sont les opinions que les hommes entretiennent et les sentiments qu’ils nourrissent à l’égard des dissidents, quant aux

  1. Toute la passion persécutante qui s’est mêlée, lorsde la révolte des cipayes, au déploiement universel des plus mauvaises parties de notre caractère national, nous offre ici un grand enseignement. Les fureurs des fanatiques et des charlatans de la tribune ne sont peut-être pas dignes de remarque ; mais les chefs du parti évangélique ont énoncé comme leur principe pour le gouvernement des Hindous et des Mahométans, qu’aucune école où la Bible n’est pas enseignée ne doit être assistée par les finances de l’État, et que nul emploi public ne peut être accordé à qui n’est pas chrétien ou ne se donne pas pour tel.
    Un sous-secrétaire d’État, dans un discours adressé à ses commettants le 22 novembre 1857, s’exprimait ainsi, à ce que l’on rapporte : « La tolérance par le gouvernement anglais de leur foi (la foi de 100 millions de sujets britanniques), de la superstition qu’ils appellent religion, avait eu pour effet de retarder la suprématie croissante du nom anglais, et d’empêcher le développement salutaire du christianisme. » La tolérance a été la pierre angulaire des libertés de notre pays. Mais qu’on se ne méprenne pas sur ce précieux mot de tolérance. De la manière dont le secrétaire d’État l’entendait, il signifiait la complète liberté pour tous, l’affranchissement du culte parmi les chrétiens qui avaient un culte fondé sur les mêmes bases ; il signifiait la tolérance de toutes les diverses sectes de chrétiens qui croyaient en un seul médiateur. Je désire appeler l’attention sur ce fait, qu’un homme estimé digne d’occuper un emploi élevé dans le gouvernement de notre pays, sous un ministère libéral, affirme cette doctrine qu’on n’a pas droit à la tolérance, quand on ne croit pas à la divinité du Christ.
    Après le stupide discours que nous venons de rapporter, qui peut se laisser aller à croire que les persécutions religieuses sont passées à tout jamais ?