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Connaissant l’impossibilité de défendre les persécutions religieuses par des arguments qui ne justifient pas Marc-Aurèle, les ennemis de la liberté religieuse acceptent quelquefois, lorsqu’on les presse vivement, cette conséquence ; et ils disent avec le docteur Johnson, que les persécuteurs du christianisme étaient dans le vrai, que la persécution est une épreuve que la vérité doit subir et subit toujours avec succès, les pénalités légales étant au bout du compte sans force contre la vérité, quoique quelquefois utiles contre des erreurs nuisibles. Cette forme de l’argument en faveur de l’intolérance religieuse est assez remarquable pour qu’on s’y arrête.

Une théorie qui soutient qu’on est justifiable de persécuter la vérité, parce que la persécution ne lui fait pas de tort, ne peut pas être accusée d’être hostile avec intention à la réception de vérités nouvelles. Mais nous ne pouvons louer la générosité de sa manière d’agir envers les personnes auxquelles l’espèce humaine doit la découverte de ces vérités. Révéler au monde quelque chose qui l’intéresse profondément et qu’il ignorait jusque-là, lui prouver qu’il s’est trompé sur quelque point vital de son intérêt spirituel ou temporel, voilà le plus important service qu’un être humain puisse rendre à ses semblables, et dans certains cas, comme celui des premiers chrétiens ou des réformateurs, les partisans