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l’utilitarisme

parler plus pratiquement, que l’intérêt de chaque individu fût autant que possible en harmonie avec l’intérêt général. Ensuite il faudrait que l’éducation et l’opinion qui ont une si grande influence sur les hommes établissent dans l’esprit de chaque individu une association indissoluble entre son propre bonheur et le bien de tous, spécialement entre son propre bonheur et la pratique des règles de conduite négatives et positives prescrites par l’intérêt général. Ainsi l’homme ne concevrait même pas l’idée d’un bonheur personnel allié à une conduite pratique opposée au bien général ; une impulsion directe à promouvoir le bien général pourrait être en chaque individu un des motifs habituels d’action ; les sentiments liés à cette impulsion tiendraient une place importante dans l’existence de toute créature.

Si l’on se représentait la morale utilitaire avec ses vrais caractères, on verrait qu’elle possède tout ce qui recommande les autres systèmes. Je ne sais pas si aucune autre doctrine peut offrir un développement plus beau, plus entraînant de la nature humaine, peut inventer, pour donner de l’efficacité à ses commandements, un ressort d’action inaccessible aux utilitaires.

Les adversaires de l’utilitarisme ne présentent pas