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ce que c’est que l’utilitarisme

grand bien pour le bien des autres. Seulement elle refuse d’admettre que le sacrifice ait une valeur intrinsèque. Un sacrifice qui n’augmente pas ou ne tend pas à augmenter la somme totale du bonheur est considéré comme inutile. La seule renonciation admise, c’est la dévotion au bonheur des autres, à l’humanité ou aux individus, dans les limites imposées par les intérêts collectifs de l’humanité.

Je dois encore répéter ce que les adversaires de l’utilitarisme ont rarement la justice de reconnaître, c’est que le bonheur qui est le criterium utilitaire de ce qui est bien dans la conduite n’est pas le bonheur propre de l’agent, mais celui de tous les intéressés. Entre le propre bonheur de l’individu et celui des autres, l’utilitarisme exige que l’individu soit aussi strictement impartial qu’un spectateur désintéressé et bienveillant. Dans la règle d’or de Jésus de Nazareth nous trouvons l’esprit complet de la morale de l’utilité. Faire aux autres ce qu’on voudrait que les autres fassent pour vous, aimer son prochain comme soi-même, voilà les deux règles de perfection idéale de la morale utilitaire. Quant aux moyens pour conformer autant que possible la pratique à cet idéal, les voici : il faudrait d’abord que les lois et les conventions sociales fissent que le bonheur ou, pour