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l’utilitarisme

un autre principe étranger, ou par ses prédilections personnelles.

Ainsi quelques personnes disent qu’il est injuste de punir quelqu’un pour l’exemple ; cette punition n’est juste que faite pour le bien du patient lui-même ; d’autres soutiennent le contraire, disant que punir quelqu’un, qui a l’âge de raison, pour son bien, c’est du despotisme, de l’injustice, puisque, si le but est seulement son propre bien, personne n’a le droit de contrôler là-dessus son propre jugement ; tandis qu’on peut justement le punir pour prévenir le mal fait aux autres, ceci étant l’exercice du droit légitime de défense personnelle. M. Owen affirme même qu’il est injuste de punir, car le criminel n’a pas fait son propre caractère ; l’éducation et les circonstances en ont fait un criminel ; ainsi il n’est pas responsable. Toutes ces opinions sont très plausibles ; aussi longtemps qu’on discutera la question comme relevant simplement de la justice, sans aller jusqu’aux principes qui sont la source d’autorité de la justice, je ne vois pas comment on pourrait réfuter ces raisonnements. Car tous trois sont appuyés sur des règles de justice évidemment vraies. Le premier fait appel à l’injustice reconnue qu’il y a à prendre un individu et à le sacrifier sans son consentement, pour le bien des autres.