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ORIANE, vivement.

Et l’enfant qui rêvait sur la route lointaine
Accourut, vit briller l’éclair de tes cheveux,
S’enivra de ta chair et, dans ses bras nerveux,
Prit, comme un ægipan, vainqueur d’une faunesse,
Ton cher corps éclatant de royale jeunesse ?

DORIETTE, un peu confuse.

Eh ! non, ce ne fût pas cela…

ORIANE.

Eh ! non, ce ne fût pas cela… Tu me parlais
D’une insulte ?

DORIETTE.

D’une insulte ? Tandis, hélas ! que je voilais
Ma face avec mes doigts mal clos, l’enfant sauvage ;
Sans se cacher parmi les saules du rivage,
Sans épier la source où je riais, pourtant !
Passa les yeux au ciel, dédaigneux et chantant.

ORIANE.

Certes, filleule, il t’a gravement offensée.
Il va mourir, c’est dit !

DORIETTE, vivement.

Il va mourir, c’est dit ! Je n’ai pas la pensée
De le tuer ! Vois-tu, cet enfant étranger,
Je le hais ! Mais on peut haïr sans égorger,
Et je ne rêve pas pour uniques délices
De le voir dévorer des louves et des lices.

ORIANE.

Veux-tu qu’il t’aime ?