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Exhalent dans leur vol un parfum de corolles
Et je suis une fée, et je sais les paroles
Qui font surgir au ciel des astres inconnus.
Je peux tout !
Tristement.
Je peux tout ! Non ! car mes longs cheveux, mes bras nus,
Ma gorge qui s’émeut sous ma robe étoilée,
Nul ne les voit ; et si parfois, dans une allée
Un voyageur épris de cieux et de forêts
Passe en chantant au loin, vite, je disparais !
Car Obéron le roi des forêts merveilleuses,
Le veut ainsi ! Je puis dormir sous les yeuses
Du chemin. Le passant ne vient pas ébloui,
Me réveiller : Je suis invisible pour lui,
Et, toute, je me mêle à la vapeur des sentes,
Aux brumes de la lune, aux clartés frémissantes
Qui meurent sur les champs, les jardins et les bois.
Elle se mire dans la fontaine. Pour qui donc suis-je belle, hélas !
Pour qui donc suis-je belle, hélas !Mais tu me vois
Ciel où veillent des yeux, et toi forêt vivante
Tu me vois. Le baiser que mon rêve me vante,
Le baiser ne vaut pas la caresse du soir,
Tout parfumé de fleurs féeriques. Mon pouvoir
Est plus doux que l’amour. Je suis l’heureuse reine
Que jamais nul désir ne troublera.

DORIETTE, entrant brusquement.

Que jamais nul désir ne troublera.Marraine,
Venge-moi !

ORIANE.

Venge-moi !Doriette ! Oh ! quels yeux en courroux !

DORIETTE.

Écoute-moi ! jadis parmi les buissons roux
Tu m’as trouvée ainsi qu’une abeille exilée
Des belles ruches d’or.