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Errer ta jeune lèvre en mes cheveux épars,
Et je riais de toi. Mais c’est assez, je pars.
Elle va vers le banc et reprend le cor.
 

SILVÈRE.

Vous partez ! Ô mon Dieu, vous me quittez. Je tremble,
Que vous ai-je donc fait ? Restez ! Mais il me semble
Puisque vous me fuyez que la lune d’été
Se retire du ciel et reprend sa clarté,
Il me semble que les forêts sont désolées,
Que tu vas emporter comme des fleurs volées
Dans ta robe et tes mains tous les astres des cieux.
Ô je souffre d’amour !
Il pleure, la tête entre ses mains, Oriane repose le cor sur le banc.
 

ORIANE, rêvant.

Ô je souffre d’amour !Songe délicieux,
Plane encore sur moi !…

SILVÈRE.

Plane encore sur moi !… Tu m’as pris mes soirs calmes,
Tu m’as pris les forêts et les jardins de palmes,
Tu m’as pris l’amitié des oiseaux fraternels.
Je ne chanterai plus : des sanglots éternels
Étoufferont en moi mes chansons bien-aimées,
Lorsque je marcherai sous les tristes ramées
Je ne connaîtrai plus la caresse des bois
Et mon cœur exilé n’entendra plus de voix.
Oriane le regarde affectant l’ironie.
Ô je mourrai de ton regard qui me méprise !

ORIANE.

Eh ! bien, non. J’ai menti ! Vous le savez, ô brise,
Ô sentier lumineux et blond où je passais
Et toi, claire fontaine amie, oui tu le sais,
Toi vers qui je penchais ma gloire aérienne
Je ne puis plus partir maintenant. Je suis sienne.