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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

enthousiasme président du conseil des jeunes ; Barbé-Marbois obtint avec le même empressement la présidence des anciens. Le corps législatif procéda à la nomination d’un directeur, pour remplacer Letourneur, qui, le 30 floréal, avait été désigné par le scrutin comme membre sortant. Son choix tomba sur Barthélémy, ambassadeur en Suisse, qui, en sa qualité de modéré et de partisan de la paix, convenait aux conseils et à l’Europe, mais que son éloignement de la France, pendant toute la révolution, rendait peu propre au gouvernement de la république.

Ces premières hostilités contre le directoire et le parti conventionnel furent suivis d’attaques plus réelles. On poursuivit sans ménagement son administration et sa politique. Le directoire avait fait tout ce qu’il avait pu avec un gouvernement légal, dans une situation encore révolutionnaire. On lui reprocha la continuation de la guerre et le désordre des finances. La majorité législative s’empara avec adresse des besoins publics : elle soutint la liberté indéfinie de la presse, qui permettait aux journalistes d’attaquer le directoire et de préparer à un autre régime ; la paix, qui opérait le désarmement de la république ; enfin, l’économie.

Ces demandes avaient leur côté utile et national. La France, fatiguée, éprouvait le besoin de toutes ces choses pour compléter la restauration sociale : aussi était-elle de moitié dans le vœu des royalistes, mais par de tout autres motifs. Elle vit avec un peu plus d’inquiétude les mesures des conseils relativement aux prêtres et aux émigrés. On désirait une pacification, mais on ne voulait pas que les vaincus de la révolution rentrassent en triomphateurs. Les conseils mirent une extrême précipitation dans les lois de grâce à leur égard. Ils abolirent justement la déportation ou l’emprisonnement contre les prêtres pour cause de religion ou d’incivisme ; mais ils voulurent restaurer les anciennes prérogatives de leur culte ; rendre le catholicisme, qui était rétabli, extérieur par l’usage des cloches, et soustraire les prêtres au serment des fonctionnaires publics. Camille Jordan, jeune député lyonnais, plein