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CONVENTION NATIONALE.

et le rétablissement des Jacobins. Mais il ne suffisait point d’envahir momentanément l’assemblée, il fallait vaincre les sections ; car c’était avec elles seulement qu’il pouvait y avoir bataille.

Les commissaires envoyés auprès des sections les avaient promptement rassemblées. Les bataillons de la Butte-des-Moulins, de Lepelletier, des Piques, de la Fontaine-Grenelle, qui étaient les moins éloignés, occupèrent bientôt le Carrousel et ses principales avenues. Alors tout changea de face ; Legendre, Kervelegan, Auguis assiégèrent à leur tour les insurgés, à la tête des sectionnaires. Ils éprouvèrent d’abord quelque résistance. Mais bientôt ils pénétrèrent, la baïonnette en avant, dans la salle où délibéraient encore les conjurés, et Legendre s’écria : Au nom de la loi, j’ordonne aux citoyens armés de se retirer. Ils hésitèrent un moment ; mais l’arrivée des bataillons qui entraient par toutes les portes les intimida, et ils évacuèrent la salle dans le désordre d’une fuite. L’assemblée se compléta, les sections furent remerciées, on reprit les délibérations. Toutes les mesures adoptées dans l’intervalle furent annulées, et quatorze représentants, auxquels on en joignit ensuite quatorze autres, furent arrêtés comme coupables d’avoir organisé l’insurrection ou de l’avoir approuvée par leurs discours. Il était alors minuit, et à cinq heures du matin les prisonniers étaient déjà à six lieues de Paris.

Malgré cette défaite, les faubourgs ne se tinrent pas pour battus, et le lendemain ils s’avancèrent en masse avec leurs canons contre la convention. Les sectionnaires de leur côté se rendirent auprès d’elle pour la défendre. Les deux partis étaient prêts à en venir aux mains ; les canons des faubourgs qui avaient débouché sur le Carrousel, étaient déjà braqués contre le château, lorsque l’assemblée envoya des commissaires auprès des insurgés. Les négociations s’entamèrent ; un député des faubourgs, admis devant l’assemblée, demanda d’abord ce qu’on avait demandé la veille, ajoutant : « Nous sommes décidés à mourir au poste que nous occupons, plu-