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CONVENTION NATIONALE.

bins qui s’étaient mis en permanence. Les députés municipaux furent reçus avec l’enthousiasme le plus exalté. « La société veille pour la patrie, leur dit-on, elle a juré de mourir plutôt que de vivre sous le crime. » On se concerta en même temps, et l’on établit des communications rapides entre ces deux centres de soulèvement. De son côté, pour faire insurger le peuple, Henriot, un pistolet à la main, courait les rues à la tête de son état-major, criant aux armes ! haranguant la multitude et provoquant tous ceux qu’il rencontrait à se rendre à la commune pour sauver la patrie ! C’est pendant cette expédition que deux conventionnels l’aperçurent dans la rue Saint-Honoré. Ils sommèrent, au nom de la loi, quelques gendarmes d’exécuter le décret d’arrestation ; ceux-ci obéirent et Henriot fut conduit garrotté au comité de sûreté générale.

Cependant, de part et d’autre, rien n’était décidé encore. Chaque parti se servait de son moyen de puissance, la convention de ses décrets, la commune de l’insurrection ; chaque parti savait quelles seraient les suites de la défaite, et c’est ce qui les rendit l’un et l’autre si actifs, si prévoyants, si décidés. Le succès fut longtemps incertain : de midi à cinq heures la convention eut le dessus ; elle fit arrêter les triumvirs, l’agent national Payan, le commandant Henriot. Elle était alors réunie, et la commune n’avait pas encore rassemblé ses forces ; mais de six à huit heures les insurgés reprirent l’avantage, et la cause de la convention faillit être perdue. Pendant cet intervalle, la représentation nationale était séparée, et la commune redoubla d’efforts et d’audace.

Robespierre avait été transféré au Luxembourg, son frère à Saint-Lazare, Saint-Just aux Écossais, Couthon à la Bourbe, Lebas à la Conciergerie. La commune, après avoir ordonné aux geôliers de ne pas les recevoir, envoya des municipaux avec des détachements pour les amener. Robespierre fut délivré le premier ; on le conduisit en triomphe à l’Hôtel-de-Ville. En arrivant, il fut reçu avec le plus grand enthousiasme et au milieu des cris de Vive Robespierre ! périssent les traîtres ! Peu auparavant, Coffinhal était parti à la tête de