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CONVENTION NATIONALE.

lution, si l’on comprimait trop la multitude, il aurait voulu maintenir la balance entre les deux extrémités de la convention. Ce parti composait les comités de sûreté générale et de salut public ; il était dirigé par Barrère, qui, comme tous les esprits justes et les caractères faibles, fut pour la modération, tant que la peur ne fit pas de lui un instrument de cruauté et de tyrannie. Au lieu des mesures décisives de Guadet, il proposa de nommer une commission extraordinaire de douze membres, chargée d’examiner la conduite de la municipalité, de rechercher les auteurs des complots ourdis contre la représentation nationale, et de s’assurer de leurs personnes. Ce terme moyen fut adopté ; mais il laissait subsister la commune, et la commune devait triompher de la convention.

La commission des Douze jeta l’alarme chez les membres de la commune par ses recherches ; elle découvrit une nouvelle conjuration, qui devait éclater le 22 mai ; fit arrêter quelques conspirateurs, et entre autres, le substitut du procureur de la commune, Hébert, auteur du Père Duchesne, qu’on saisit au sein même de la municipalité. La commune, d’abord stupéfaite, se mit en mesure de combattre. Dès ce moment, il ne fut plus question de complots, mais d’insurrections. Le conseil général, encouragé par les Montagnards, s’entoura des agitateurs de la capitale : il fit répandre le bruit que les Douze voulaient épurer la convention, et remplacer le tribunal qui avait acquitté Marat par un tribunal contre-révolutionnaire. Les Jacobins, les Cordeliers, les sections, se mirent en permanence. Le 26 mai, l’agitation commença à se faire sentir ; le 27, elle devint assez forte pour que la commune pût ouvrir l’attaque. Elle se présenta à la convention, et demanda la liberté d’Hébert et la suppression des Douze ; elle était suivie de députés des sections, qui exprimaient le même vœu, et la salle était entourée de rassemblements considérables. La section de la cité osa même demander que les Douze fussent traduits devant le tribunal révolutionnaire. Isnard, président de l’assemblée, leur répondit d’un ton solennel : « Écoutez ce que je vais vous dire. Si jamais, par une