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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

bre, abrogeait les usages belges, et organisait ce pays démocratiquement. Les Jacobins envoyèrent de leur côté des agents en Belgique pour y propager la révolution, pour y établir des clubs sur le modèle de la société-mère ; et les Flamands, qui nous avaient reçus avec enthousiasme, furent refroidis par les réquisitions dont on les frappa, par le pillage général et l’anarchie insupportable que les Jacobins amenèrent avec eux. Tout le parti qui avait combattu la domination autrichienne, et qui espérait être libre sous le protectorat de la France, trouva notre domination plus dure, et regretta de nous avoir appelés ou soutenus. Dumouriez, qui avait des projets d’indépendance pour les Flamands et d’ambition pour lui-même, vint à Paris se plaindre de cette conduite impolitique à l’égard des pays conquis. Il changea sa marche jusque-là équivoque. Il n’avait rien oublié pour se ménager entre les deux factions : il ne s’était rangé sous la bannière d’aucune, espérant se servir de la droite par son ami Gensonné, de la Montagne par Danton et Lacroix, et d’en imposer à l’une et à l’autre par ses victoires. Mais dans ce second voyage, il essaya d’arrêter les Jacobins et de sauver Louis XVI ; n’ayant pas pu en venir à bout, il se rendit à l’armée pour commencer la seconde campagne, très mécontent et décidé à faire servir de nouvelles victoires à suspendre la révolution et à changer son gouvernement.

Toutes les frontières de la France devaient être attaquées cette fois par les puissances de l’Europe. Les succès militaires de la révolution et la catastrophe du 21 janvier avaient fait entrer dans la coalition la plupart des gouvernements encore indécis ou neutres.

En apprenant la mort de Louis XVI, le cabinet de Saint-James renvoya le ministre Chauvelin, qu’il avait déjà refusé de reconnaître depuis le 10 août et la déchéance du roi. La convention, voyant l’Angleterre déjà liée à la coalition, et par conséquent toutes ses promesses de neutralité vaines et illusoires, déclara, le 1er février 1793, la guerre au roi de la Grande-Bretagne, ainsi qu’au stathouder de Hollande qui, depuis 1788, était entièrement subordonné au cabinet de