impérieuse, et elle la finit en demandant la déchéance du roi et une convention nationale. Les députations se succédèrent, et toutes présentaient le même vœu, ou, pour mieux dire, intimaient le même ordre. L’assemblée se vit contrainte à les satisfaire. Cependant elle ne voulut point prendre sur elle la déchéance du roi. Vergniaud monta à la tribune, au nom de la commission des douze, et il dit : « Je viens vous proposer une mesure bien rigoureuse ; mais je m’en rapporte à votre douleur pour juger combien il importe que vous l’adoptiez sur-le-champ. » Cette mesure consistait dans la convocation d’une assemblée nationale, dans la destitution des ministres, et dans la suspension du roi. L’assemblée l’adopta unanimement. Les ministres girondins furent rappelés ; les fameux décrets furent mis à exécution ; on déporta environ quatre mille prêtres non assermentés, et l’on envoya des commissaires aux armées pour s’assurer d’elles. Louis XVI, à qui l’assemblée avait d’abord donné le Luxembourg pour demeure, fut transféré au Temple, comme prisonnier, par la toute-puissante commune, sous prétexte qu’elle ne pouvait point sans cela répondre de sa personne. Enfin le 23 septembre fut désigné pour l’ouverture de l’assemblée extraordinaire qui devait décider du sort de la royauté. Mais la royauté venait de succomber de fait au 10 août, dans cette journée qui fut l’insurrection de la multitude contre la classe moyenne et contre le trône constitutionnel, comme le 14 juillet avait été l’insurrection de la classe moyenne contre les classes privilégiées et le pouvoir absolu de la couronne. Le 10 août vit commencer l’époque dictatoriale et arbitraire de la révolution. Les circonstances devenant de plus en plus difficiles, il s’engagea une vaste guerre qui exigea un surcroît d’énergie ; et cette énergie, déréglée parce qu’elle était populaire, rendit inquiète, oppressive et cruelle la domination de la classe inférieure. La question alors changea entièrement de nature ; elle n’eut plus pour but la liberté, mais le salut public ; et la période conventionnelle, depuis la fin de la constitution de 1791 jusqu’au moment où la constitution de l’an III établit le directoire, ne
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RÉVOLUTION FRANÇAISE.