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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

être attendu, à la barre de l’assemblée. Il demanda, tant en son nom qu’au nom des troupes, le châtiment des attentats du 20 juin, et la destruction de la secte jacobine. Sa démarche excita des sentiments divers dans l’assemblée. Le côté droit l’applaudit beaucoup ; mais le côté gauche s’éleva contre sa conduite. Guadet proposa d’examiner s’il n’était pas coupable d’avoir quitté son armée, et d’être venu dicter des lois à l’assemblée. Un reste de respect empêcha celle-ci de suivre l’avis de Guadet ; et, après des débats assez tumultueux, elle admit Lafayette aux honneurs de la séance, mais ce fut là tout du côté de l’assemblée. Lafayette se tourna alors vers la garde nationale, qui lui avait été dévouée pendant si longtemps, et il espéra, avec son aide, fermer les clubs, disperser les Jacobins, rendre à Louis XVI toute l’autorité que lui conférait la loi, et raffermir la constitution. Le parti révolutionnaire était dans la stupeur, et redoutait tout de la hardiesse et de la célérité de cet adversaire du Champ-de-Mars. Mais la cour, qui craignait le triomphe des constitutionnels, fit échouer elle-même les projets de Lafayette ; il avait indiqué une revue, qu’elle empêcha par son influence sur les chefs des bataillons royalistes. Les grenadiers et les chasseurs, compagnies d’élite mieux disposées encore que les autres, devaient se réunir chez lui, et marcher de là contre les clubs, et il ne se présenta pas trente hommes. Ayant ainsi vainement tenté de rallier à la cause de la constitution et de la défense commune la cour et la garde nationale, se voyant délaissé par tous ceux qu’il venait secourir, Lafayette repartit pour son armée, après avoir perdu ce qui lui restait de popularité et d’influence. Cette tentative fut le dernier signe de vie du parti constitutionnel.

Alors l’assemblée revint naturellement à la situation de la France, qui n’avait pas changé. La commission extraordinaire des douze présenta, par l’organe de Pastoret, un tableau peu rassurant sur l’état et les divisions des partis. Jean Debry, au nom de la même commission, proposa, pour maintenir dans le calme le peuple, qui était extrêmement agité, d’annoncer