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DICTIONNAIRE DE THEOLOGIE MORALE


saint, en parlant de la certitude que doit avoir un directeur des âmes au sujet de ses pénitents, après avoir dit que dans le for extérieur on ne doit pas se contenter de ce que dit l’accusé, mais chercher à s’assurer de la vérité, il avertit qu’il en est bien autrement dans le for intérieur. Voici ses paroles Alio modo per confessionis manifestationem, et quantum ad hanc cognitionem non potest majorem certitudinem accipere, quam ut subdito credat quia hoc est ad subvrnientum conscientiœ ipsius unde in foro conscientiœ creditur homini et pro se, et contra se. {Suppl., q. 8, art. 5, ad 2.) C’est pourquoi, comme il n’y a personne à qui il importe plus de dire la vérité qu’au pénitent lui-même, si le confesseur n’a pas un bon motif de douter de sa sincérité quand il lui dit qu’il s’est excité au repentir de ses fautes, qu’il est résolu de changer de vie, et qu’il est prêt il recevoir les remèdes et les pénitences qu’il lui donne, il a toute la certitude que peut désirer un confesseur prudent et discret[1]. »

36. « La miséricorde de Dieu est sans bornes. Dieu entre quelquefois dans le cœur des pécheurs quand ils le méritent le moins, et, contre le cours ordinaire, il y opère non peu à peu, mais tout à coup, un sincère changement. Lors donc qu’un confesseur a des marques solides et prudentes de cette opération de la grâce dans le pécheur, et qu’il peut dire avec fondement Cette âme est véritablement et sincèrement contrite, le dérèglement de sa vie passée est pour lors effacé par sa conversion actuelle manifestée par des apparences non équivoques et légères, mais solides et prudentes. S’il se présente donc un pénitent qui vous dise, à vous confesseur « Mon père, je suis un grand pécheur, j’ai même péché ce matin mais étant ensuite allé entendre prêcher un saint homme, je me suis senti le cœur touché de terreur et de componction ; j’ai résolu de changer de vie à tout prix ; » tous le voyez, semblable à David quand Nathan lui parlait, vous témoigner, par l’amertume de ses larmes et par ses profonds soupirs, la sincérité avec laquelle il dit Peccavi ou bien, si un autre vous dit : « Je viens d’un pays éloigné de tant de lieues, sans aucun intérêt, mais seulement parce que je ne puis plus supporter le poids de mes péchés ; la nuit dernière je n’ai fait que pleurer, et à peine l’aurore a-t-elle paru que je suis parti. » Un troisième vous dit : « Aujourd’hui fête de la sainte Vierge, en récitant à l’ordinaire le rosaire, et c’est la seule marque de chrétien que j’aie retenue au milieu d’une vie pleine de désordres, je me suis senti tout attendri par cette mère des pécheurs, et enflammé d’un vif désir de me venir confesser ; depuis tant d’années je ne fais point de Pâques ; ou bien, depuis tant d’années je cache tel péché en confession. Or, en ces cas et semblables, ne voyez-vous pas la grande différence entre L’état passé et l’état actuel de cette personne ? Ce changement n’a-t-il pas été efficace et sincère en produisant des effets si difficiles et si notables ? N’y voyez-vous pas bien clairement le doigt de Dieu, qui a préparé suffisamment ce pécheur à être absous dès à présent ? Imitez donc votre maître, en ministre fidèle. Il s’est montré libéral en grâce dans la conversion du pécheur ; soyez aussi libéral, et ne lui faites pas attendre les avantages qui vous sont confiés, la justification et la paix dont vous êtes débiteur envers les pécheurs contrits, selon le canon Alliyant, 26 : Si Deus benignus est, utquid sacerdos erit austerus ? Vous pourrez tout au p’us aider le pénitent à renouveler la douleur et éprouver sa bonne volonté en donnant d’abord une pénitence un peu forte, et la dim nuant ensuite ou même donner un quart d’heure pour s’exciter à la douleur et revenir après pour être absous de suite. Combien n’a-t-on pas vu de ces sortes de cas, où le pénitent, quelques instants après avoir reçu l’absolution, mourait par un accident avec tous les signes de salut ; comme si Dieu voulait par là justifier visiblement et approuver la conduite des confesseurs discrets, qui, sans scrupule ni rigueur, avaient absous sans relard Aussi les evéques de Flandre, réunis en 1697, déclarèrent Deum in conversione peccutoris non tam considerare mensuram temporis, quam doloris ; et longtemps avant eux, saint Léon le Grand avait dit (Epist. 83, c. 4) Nullas patitur reniœ morat vera conversio et in dispensandis Dei donit non debemus esse difficiles, nec accusantium se lacrymas gemilusque negligere, cum ipsam paenitendi affectionem ex Dei credamus inspiratione conceptam[2]. »

ABSTÈME.

Abstème, du latin abstemius, fait d’abs et tementum, ancien mot qui signifie vin, boisson. Cette expression est employée pour désigner celui qui ne boit pas de vin. On s’en sert en théologie quand on veut parler de ceux qui dans la communion ne peuvent prendre les espèces du vin, à cause de l’aversion qu’ils ont pour cette liqueur. Le prêtre abstème est irrégulier quand il ne peut nullement prendre de vin, ou qu’il ne peut en prendre sans danger de vomissement. Liguori, lib. vii, n. 409. Si l’abstème peut en prendre pour la communion, il n’est point irrégulier. Avec dispense, il pourra n’employer que de l’eau aux ablutions. (Lig., lib. ii, no 408.)

ABSTINENCE.

1. En terme de religion catholique, l’abstinence est la privation de viandes ordonnée en certains jours de l’année. Ce genre de mortification a été pratiqué par tous les peuples ; il n’en est pas un seul auquel l’usage total ou partiel de la viande n’ait été interdit soit comme moyen de sanctification soit comme régime sanitaire. Les saints de l’Ancien Testament l’ont employé lorsqu’ils ont voulu obtenir des grâces pour eux et pour les autres. On en trouve des exemples dans

  1. Pratique charitable et discrète du sacrement de pénitence, n. 65.
  2. Pratique, etc., n. 97.