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Il est évident que la langue internacionale devant être employée par des multitudes d’homes pris dans toutes les condicions sociales, sera nécessairement construite de manière à être à la portée de tous les civilizés d’instrucsion moyène et devra être accessible aus plus modestes intèligences. Il faudra donc en éliminer toutes les subtilités qui, dans nos langues actuèles, font les délices des érudits et… le dézespoir des écoliers ; puis, sa simplicité devra être absolue. C’est-à-dire que sa gramaire et sa sintaxe se réduiront au strict nécessaire et se conformeront de la manière la plus absolue aus lois lojiques de l’expression des idées chez les peuples civilizés. Toutes les dézinences superflues ou inutiles devront en être banies et ses formes verbales auront la simplicité, la fixité et la paucité, qui en faciliteront la promte assimilacion.

Nous savons tous quel éfort nous impoze l’aquizicion d’un vocabulaire étranjer, même incomplet. Celui de la langue internacionale devra satisfaire à ces deus condicions qui semblent contradictoires : ne pas charjer la mémoire et être idoine à exprimer toutes les idées possibles. C’est-à-dire qu’il ne comtera qu’un petit nombre de radicaus et que ces radicaus en se combinant entre eus ou avec des sufixes et préfixes doneront facilement toutes les combinaizons imajinables de l’expression verbale.

Il est à peine bezoin d’insister sur la seconde condicion. Une langue internacionale ne serait pas l’instrument pratique qu’èle doit être, avant tout, si èle n’était aisément parlable et scriptible et propre à servir de lien entre homes de toute nacion, de toute langue et de toute condicion. La langue internacionale devra, selon cète admirable expression, se faire toute à tous ; èle ne sera la langue spéciale ni des savants, ni des comerçants, ni des touristes, pouvant tout dire, èle s’adressera à tous et sera également acsessible à tous.

À ce prix seulement, èle sera, come je l’ai dit plus haut, la langue seconde de l’humanité.

Si vous le voulez bien, Mesdemoizeles, nous nous arrêterons un instant pour jeter un coup d’œil en arrière et nous demander si cète troizième solucion, c’est-à-dire la créacion d’une langue artificièle devant servir de langue auxiliaire internacionale, est une simple fantaizie fin-de-siècle, ou si, au contraire, èle a subi l’épreuve du temps et peut se targuer d’un certain nombre de quartiers de noblesse.

Vous direz peut-être que, pourvu qu’une choze soit bone, vous vous inquiétez fort peu de son état civil, et en cela je ne saurais trop vous aprouver. Mais enfin, il ne manque pas de jens chez qui la fobie de toutes les nouveautés remplace le raisonement et