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LIVRE VII

LA DÉLIBÉRATION


Sages conseils de Bartek, surnommé le Prussien. — Allocution martiale de Maciek le Bénisseur. — Allocution politique de Monsieur Buchman. — Jankiel prêche la concorde : elle est rompue par le Canif. — Discours de Gervais, par où l’on peut voir la puissance de l’éloquence parlementaire. — Protestation du vieux Maciej. — L’arrivée subite de renforts met fin aux débats. — Haro sur Soplitza !


C’est au tour de Bartek d’exposer sa pensée.
Souvent de Kœnigsberg il fait la traversée[1];
Aussi c’est le Prusak[2] que l’appellent les siens :
C’est pour rire, car il exècre ces Prussiens,
Dont il parle toujours. Frisant la soixantaine,
Il a vu de ses yeux mainte terre lointaine :
Grand lecteur de journaux, politique prudent,
Il préside aux débats quand Maciej est absent.
Il concluait ainsi :

Il concluait ainsi : « Ce n’est pas là, mon frère,
Non certes, ce n’est pas, Maciej, notre bon père,
Peu de chose. Etre avec les Français, sarpejeu !
C’est avoir, d’après moi, les quatre as dans son jeu !
Quels soldats ! Et depuis notre vaillant Thadée
Kościuszko, le monde eut-il, à votre idée,
Un meilleur général que leur grand Empereur ?
Demandez aux Prussiens comme ils en avaient peur !
J’étais en ce moment hors de Lithuanie,
En l’an mil huit-cent six ; comme j’ai la manie
De toujours voyager, j’allais en Posnanie
Voir mes nombreux parents ; j’etais donc chez Joseph
Grabowski ; d’une troupe à présent il est chef,
Mais il vivait alors en bon propriétaire,
Et, près d’Objezierze, nous chassions dans sa terre.
Comme ici maintenant, la paix régnait partout,
Quand la grande nouvelle éclata tout à coup.

  1. Il va y vendre son blé par les bateaux du Niemen.
  2. Prussien. C’est le premier des nombreux surnoms qu’on trouvera dans ce VIIe livre, et que nous traduisons littéralement, malgré leur excentricité, qui paraîtra bizarre au lecteur français, mais qu’exige la couleur locale.