Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/201

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sie. Igor dort, Igor s’éveille ; sa pensée ardente parcourt l’espace entre le Don et le Donetz. Owlur attend avec le cheval, il siffle ; Igor a compris le sifflement d’Owlur. Il n’y a plus d’Igor ; mais bien loin on entend sourdement retentir la terre, on entend le bruit du gazon des steppes, et au loin, déjà derrière lui, se noircissent les tours des Polowzs. Le prince Igor s’élance comme une hermine sur les roseaux ; comme un plongeon, il pénètre dans les vagues ; tantôt il saute sur son coursier, tantôt il court à pied comme un loup vers les bords du Donetz. Il fend le brouillard comme le faucon, tuant les oies et les cygnes pour se nourrir le matin, à midi et le soir.

» — Prince Igor, s’écria le Donetz, à toi la gloire, à Kontchak l’amertume, à la Russie la joie ! — Igor répondit : À toi la gloire, ô Donetz ! Toi qui berces mollement ton prince sur tes flots, tu lui as préparé un lit de gazon sur tes rives argentées, tu le couvres d’un nuage chaud à l’ombre des verts rameaux. J’ai été pour toi dans les eaux un plongeon, sur les vagues un vanneau, dans les airs un canard sauvage. » —

» Gsak et Kontchak suivent les traces d’Igor. Cependant, les corbeaux ne croassent plus, les geais se taisent, les pies gardent le silence. Les pics seuls montent sur les arbres et indiquent par leurs coups de bec le chemin de la rivière. — Gsak dit à Kontchak. — Si le faucon s’est envolé vers sa demeure, avec des flèches d’or nous tuerons le fauconneau. — Kontchak lui répond : Si le faucon s’est envolé vers sa demeure, nous marierons le fauconneau avec