Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/198

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Plisensk. Dois-je envoyer quelqu’un pour avoir des nouvelles du côté de la mer ? »

Les boyards répondirent :

« — Ô prince, un grand chagrin pèse sur tes vieux jours, car il y a deux oiseaux qui se sont envolés de ta maison pour prendre Tmoutmorakan, pour boire le Don avec leurs casques ; mais déjà les païens avec leurs glaives leur ont coupé les ailes et sur leurs pieds ils ont mis des fers.

» Il y eut deux belles journées, il fit sombre le troisième jour, et les deux soleils s’éclipsèrent, et avec eux deux lunes nouvelles.

» Swiatoslaw avec Oleg se cachent dans les brouillards, car il y a un nuage aux bords de la Kaïala. Les ennemis se répandent sur la terre russienne et ils envoient par mer beaucoup de butin dans leur pays et de grands cadeaux pour leur khan. ».

Ici commence le plus beau passage du poëme. Swiatoslaw, tournant toutes ses pensées vers la Russie, reproche aux princes ses parents, d’avoir abandonné la Russie. Voici ce morceau, bien difficile à traduire.

« Alors le grand Swiatoslaw versa ces paroles d’or pur, lavées dans les larmes : — Ah ! mes fils, vous avez dit : Osons nous seuls ! Nous atteindrons à nous deux la renommée qui est devant nous. Oh ! mes enfants, vous avez trop tôt ceint le glaive à vos côtés. Pour vous seuls vous avez voulu la gloire ; par vous seuls la défaite des Polovczs. Oui, vos cœurs sont forgés d’un acier pur, retrempés dans la vaillance ; mais dans cette guerre vous vous êtes conduits en