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cher frère Wsewolod. Et le lendemain, et le jour suivant la bataille continue. Et les étendards d’Igor tombent. Le frère dit adieu à son frère en s’embrassant, et au bord de la Kaiala la valeureuse race des Ruthiniens succombe pour son pays. Le gazon souillé et jauni recouvre la terre avec tristesse, les arbres dans leur douleur penchent leurs branches vers la terre. Car le temps n’est pas le temps de la joie et toute la contrée est devenue déserte. Et une vierge inconnue à la race des Holeg plane sur la terre de Boïan. C’est le malheur. Et elle… »

Ce malheur, représenté très souvent comme une vierge, est une image fréquente dans la poésie slave. Beaucoup de passages de cette composition sont obscurs pour nous. Les commentaires qui ont paru jusqu’ici sont insuffisants ; on ne leur trouvera un véritable éclaircissement que dans d’autres poésies nationales, dont l’amour patriotique fait tous les jours paraître des collections nouvelles.

Quant au Boïan dont parle le poète, on présume que c’était un des chevaliers du prince russien. Le mot boï signifie la même chose que guerre, alors Boïan signifierait le guerrier. Plus tard on crut que ce Boïan devait être la personnification des contes populaires ; car le mot slave baï signifie conte. Ce Baï est représenté avec une casaque de paysan, des chaussures d’écorce. Le paysan slave, avant de conter, a l’habitude de regarder en l’air, de se tourner comme pour chercher l’inspiration, il dit alors ; « Baï se promène sur le plafond, Baï se promène sur les murs. »