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Toutes ces qualités d’écrivain indépendant, Gallus les doit au christianisme développé en Pologne. Déjà l’aristocratie avait un caractère particulier ; déjà on · voyait sur la scène historique de grandes figures de gentilshommes qui résistaient au pouvoir royal, quelquefois avec succès.

Un de ces personnages, nommé Sieciech, que le chroniqueur compare à Jugurtha, occupe plusieurs chapitres de son histoire. Gallus est amené ainsi à juger les rapports politiques qui existaient entre le roi et le peuple. Il sait apprécier le caractère des souverains ; il ne passe pas sous silence, comme Nestor, leurs actions morales : il les flétrit où il les loue selon ses propres opinions religieuses et politiques. Son héros Boleslas fit tuer un de ses frères naturels. Ce frère soulevait sans cesse des orages dans le pays ; · vaincu, exilé plusieurs fois, il revenait toujours pour conspirer de nouveau. Gallus, cependant, n’excuse pas son prince. « — Dois-je justifier Boleslas ? Nullement. » — Toutefois, en parlant ainsi, il veut atténuer ses reproches par l’énumération des crimes du rebelle, et il ajoute : « — Nous avons vu la grande douleur de notre maître ; nous l’avons vu, couvert de cendres, se livrer à son désespoir. » — Il raconte ensuite les bonnes actions par lesquelles le roi voulait racheter son crime, ses pénitence, ses pèlerinages, ses fondations pieuses. Cela montre déjà un sentiment moral très développé dans le nation polonaise et surtout, dans la classe régnante, dans l’ordre équestre. De même que le meurtre de l’évêque Stanislas fut dans notre histoire le dernier meurtre politique, ainsi le