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composait d’hommes valeureux et entreprenants mais y inconstants et légers (c’est ainsi, du moins, que les auteurs byzantins ont dépeint les Lechs du Caucase) ; en se mêlant aux Slaves, ils avaient ajouté, à leurs propres défauts, la rudesse et la sensualité de ces peuples. Le clergé chrétien, entouré d’une telle société, s’imprégnait, peu à peu, des mœurs nationales et perdait son ascétisme, son autorité morale et surtout cet enthousiasme qui caractérisait le prêtre du moyen âge.

L’état moral de la Pologne à cette époque a été très bien dépeint par un chroniqueur contemporain, qui y raconte l’ambassade envoyée au pape par un prince polonais pour demander la couronne royale. Le pape était bien disposé, la couronne était déjà prête, lorsqu’un ange apparut au souverain pontife et lui dit que les Polonais n’étaient pas dignes encore d’avoir pour chef un oint du Seigneur. Cette noblesse, ajoute le chroniqueur, préfère la violence à la justice ; ses forêts et ses chasses ont plus de charmes pour elle que l’agriculture et les soins de la législation ; elle estime plus ses limiers que les hommes ; elle est plus propre, en un mot, à se battre qu’à bâtir des églises.

Quoi qu’il en soit de cette légende, les papes refusèrent longtemps la couronne royale aux ducs de Pologne.

Les évêques catholiques de cette nation étaient souvent, à cette époque, de grands seigneurs polonais ; dans leurs actions, ils montraient toutes les qualités et tous les vices de leur caste. Le clergé inférieur, les abbés et les curés, provenant de la petite noblesse, en avaient le patriotisme, le penchant guerrier, l’hospi-