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Cette tendance spiritualiste était si invincible en moi que j’y suis resté fidèle dans l’histoire des époques matérielles, qui matérialisaient bon nombre de nos contemporains ; je parle des époques troubles et sensuelles qui finissent le moyen âge, et commencent les temps modernes.

Au quatorzième siècle, qu’ai-je analysé, développé, mis en lumière, aux dépens de tout le reste ? La grande question religieuse, celle du Temple.

Au quinzième, sous Charles VI, la grande question morale : « Comment, d’ignorance en erreur, d’idées fausses en passions mauvaises, d’ivresse en frénésie, l’homme perd-il sa nature d’homme ? (t. IV)… » Puis, ayant perdu la France par un fol, je la sauvai par la folie héroïque et sainte de la Pucelle d’Orléans[1].

Le sentiment de la vie morale, qui seul révèle les causes, éclaira, dans mes livres et dans mes cours, les temps de la Renaissance. Le vertige de ces temps ne me gagna pas, leur fantasmagorie ne m’éblouit point, l’orageuse et brillante fée ne put me changer, comme elle en a changé tant d’autres ; elle fit en vain passer devant mes yeux son iris aux cent couleurs… D’autres

  1. Quand je raconte Charles VI, ils me croient matérialiste, quand je raconte la Pucelle, ils me croient spiritualiste ; pauvres critiques, qui jugent sur la nature du sujet, et non sur la méthode, qui a toujours été la même.