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fallait un homme qui eût été homme à la plus haute puissance, un individu qui fût à la fois une personne réelle et une idée de plus, un homme complet, de pensée et d’action ; un homme enfin dont la vie fût connue tout entière, et dans le plus grand détail, dont tous les actes, toutes les paroles, eussent été notés et recueillis.

Si Luther n’a pas fait lui-même ses Mémoires, il les a du moins admirablement préparés[1]. Sa correspondance n’est guère moins volumineuse que celle de Voltaire. De plus, il n’est aucun de ses ouvrages dogmatiques ou polémiques où il n’ait, sans y songer, déposé quelque détail dont le biographe peut faire son profit. Ajoutez que toutes ses paroles ont été avidement recueillies par ses disciples. Le bon, le mauvais, l’insignifiant, ils ont tout pris ce que Luther laissait échapper dans la conversation la plus familière, au coin du feu, au jardin, à table, après souper, la moindre chose qu’il disait à sa femme, à ses enfants, à lui-même, vite ils l’écrivaient. Un homme observé et suivi de si près a dû à chaque instant laisser

  1. Nous avons suivi pour les œuvres allemandes l’édition de Wittemberg, en 12 volumes in-folio, 1539-1559 ; pour les œuvres latines, celle de Wittemberg, en 7 volumes in-folio, 1545-1558, quelque fois celle d’Iéna, 1600-1612, en 4 volumes in-folio ; pour les Tischreden, l’édition de Francfort, 1568, in-folio.
    Quant aux citations tirées des Lettres, elles ont été exactement datées dans le texte et suffisent pour faire retrouver aisément ces passages dans l’excellente édition de M. de Wette, 5 volumes in-8° ; Berlin, 1825. Indépendamment des œuvres de Luther, nous avons mis à profit quelques autres ouvrages : Ukert, Seckendorf, Mahreinecke, etc.