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à la papauté plus qu’au pape, il écrivit dans les deux langues une longue lettre à Léon X, où il s’excusait de lui en vouloir personnellement. « Au milieu des monstres de ce siècle, contre lesquels je combats depuis trois ans, il faut bien qu’une fois pourtant, très honorable Père, je me souvienne de toi. Ta renommée tant célébrée des gens de lettres, ta vie irréprochable te mettrait au-dessus de toute attaque. Je ne suis pas si sot que de m’en prendre à toi, lorsqu’il n’est personne qui ne te loue. Je t’ai appelé un Daniel dans Babylone, j’ai protesté de ton innocence... Oui, cher Léon, tu me fais l’effet de Daniel dans la fosse, d’Ézéchiel parmi les scorpions. Que pourrais-tu, seul contre ces monstres ? Ajoutons encore trois ou quatre cardinaux savants et vertueux. Vous seriez empoisonnés infailliblement si vous osiez entreprendre de remédier à tant de maux... C’en est fait de la cour de Rome. La colère de Dieu est venue pour elle à son terme ; elle hait les conciles, elle a horreur de toute réforme. Elle remplit l’éloge de sa mère, dont il est dit : Nous avons soigné Babylone ; elle n’est pas guérie ; laissons Babylone. O infortuné Léon, qui siège sur ce trône maudit ! Moi je te dis la vérité, parce que je te veux du bien. Si saint Bernard avait pitié de son pape Eugène, quelles seront nos plaintes, lorsque la corruption a augmenté trois cents ans de plus... Oui, tu me remercierais de ton salut éternel, si je venais à bout de briser ce cachot, cet enfer, où tu te trouves retenu. »

Lorsque la bulle de condamnation arriva en Allemagne,