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le trouble de ma conscience, et je revenais toujours frapper au même endroit de saint Paul, brûlant de pénétrer ce qu’il voulait dire.

« Comme je méditais nuit et jour sur ces paroles (La Justice de Dieu se révèle en lui, comme il est écrit : le juste vit de la Foi), Dieu eut enfin pitié de moi ; je compris que la Justice de Dieu, c’est celle dont vit le juste, par le bienfait de Dieu, c’est-à-dire la Foi ; et que le passage signifiait : l’Évangile révèle la Justice de Dieu, justice passive, par laquelle le Dieu miséricordieux nous justifie par la foi. Alors je me sentis comme rené, et il me sembla que j’entrais, à portes ouvertes, dans le Paradis... Je lus plus tard le livre de saint Augustin, De la Lettre et de l’Esprit, et je trouvai, contre mon attente, qu’il entend aussi par Justice de Dieu celle de laquelle Dieu nous revêt en nous justifiant. Je m’en réjouis, quoique la chose soit dite encore imparfaitement dans ce livre, et que ce Père ne s’explique pas complètement ni avec clarté sur la doctrine de l’imputation...»

Il ne manquait à Luther pour se confirmer dans la doctrine de la grâce que de visiter le peuple chez lequel la grâce avait défailli. C’est de l’Italie que nous parlons. On nous dispense de peindre cette Italie des Borgia. Il y avait certainement à cette époque quelque chose qui s’est vu rarement ou jamais dans l’histoire : une perversité raisonnée et scientifique, une magnifique ostentation de scélératesse, disons tout d’un mot le prêtre athée, se croyant roi du monde. Cela était du