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cheveux avec le pape, j’ai épousé une nonne échappée, et j’en ai eu des enfants. Qui a vu cela dans les étoiles ? Qui m’aurait annoncé d’avance qu’il en dût arriver ainsi ? »

Jean Luther, père de celui qui est devenu si célèbre, était de Mcera ou Mœrke, petit village de Saxe, près d’Eisenach. Sa mère était fille d’un bourgeois de cette ville, ou, selon une tradition que j’adopterais plus volontiers, de Neustadt en Franconie. Si l’on en croyait un auteur moderne qui ne cite point ses autorités, Jean Luther aurait eu le malheur de tuer, dans une prairie, un paysan qui y faisait paître ses troupeaux, et eût été forcé de se retirer à Eisleben, plus tard dans la vallée de Mansfeld. Sa femme l’avait suivi enceinte ; elle accoucha en arrivant à Eisleben de Martin Luther. Le père, qui n’était qu’un pauvre mineur, avait bien de la peine à soutenir sa famille, et l’on verra tout à l’heure que ses enfants furent obligés quelquefois de vivre d’aumône. Cependant, au lieu de les faire travailler avec lui, il voulut qu’ils allassent aux écoles. Jean Luther paraît avoir été un homme plein de simplicité et de foi. Lorsque son pasteur le consolait dans ses derniers moments : « Pour ne pas croire cela, dit-il, il faudrait être un homme bien tiède. » Sa femme ne lui survécut pas d’une année (1531). Ils avaient alors une petite fortune, qu’ils devaient sans doute à leur fils. Jean Luther laissa une maison, deux fourneaux à forge, et environ mille thalers en argent comptant.

Les armes du père de Luther, car les paysans en