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LES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION

La royauté et le peuple firent un contraste admirable. L’une abandonna Venise, puis la ligne de l’Adige, puis trahit Milan. Et le peuple lombard déclara que Venise était lui-même, que Vérone était lui-même, que l’Adige était lui-même, et que, plutôt que de s’en séparer, il aimait mieux périr.

Il ne faut donc point accuser ici les Piémontais, les Génois. Est-ce qu’on ne vit pas, à ce déplorable abandon de Milan, quand toute la population, saisie d’horreur à l’approche des Autrichiens, sortait de ses murs, hommes, femmes, enfants, les Piémontais désolés aider les pauvres émigrants, emporter les petits enfants qui ne pouvaient pas marcher ?

Quels furent aussi l’émotion, l’enthousiasme de Gênes, quand elle apprit l’héroïque réponse de Venise, qui, seule, sans secours au monde, délaissée des troupes sardes, délaissée des troupes du pape, déclara qu’elle résistait !

Ce fut pour notre Mameli l’occasion d’un triomphe. Une grande réunion du peuple se fit au théâtre de Gênes, et son jeune poète, paraissant sur la scène, mendia pour Venise dans un de ses chants les plus sublimes

« Aux rives de l’Adriatique, il est une grande mendiante, de souvenir, de gloire immortelle. Demandez à l’Antiquité !… », etc.

Ce beau chant pour Venise est aussi une douloureuse lamentation sur les destinées de Milan, sur celles de l’Italie, qui, « hélas ! a cru aux rois ». Ce dernier mot revient à chaque strophe avec l’accent naïf d’une complainte.

Depuis les temps de la Grèce, où le poète-soldat