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LES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION

soutenu par sa tante, une fruitière. Mais bientôt il se suffit à lui-même, il se fit soldat.

Hoche, à vingt ans, faisait son éducation comme s’il eût prévu sa destinée. Il dévorait tout. Faut-il dire que ce grand homme, pour acheter quelques livres, tirait de l’eau, la nuit, chez les jardiniers ? Le jour, il brodait des gilets d’officiers et les vendait dans un café que l’on montre encore au bas du Pont-Neuf.

Son imagination était alors infiniment active et mobile. Il lisait, dévorait Rousseau, le bréviaire de la Révolution, en attendant qu’elle vînt. Il lisait aussi des voyages. Il s’engagea, croyant que c’était pour les Indes ; il se trouva que, par une supercherie ordinaire aux recruteurs, ils lui avaient fait signer un engagement dans les Gardes-françaises[1].

Ce corps participait beaucoup à l’esprit du temps. Les Gardes-françaises étaient en faction aux théâtres, aux lieux publics ils y recevaient d’avance le souffle de la Révolution.

L’Ancien-Régime était assez fou cependant pour se fier aux Gardes-françaises, mariés pour la plupart. Fort impolitiquement on avait supprimé le dépôt où l’on élevait les enfants de troupe.

Le coup d’État du 23 mai 89, qui brisait la volonté de cinq millions d’électeurs, et donnait au clergé un veto contre la Noblesse et le Tiers, n’épargnait pas l’armée.

Par l’acte du 23, le roi déclarait de la manière la

  1. Presque tous les détails intimes de cette biographie m’ont été donnés directement par la veuve de Hoche.