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LES FEMMES DE LA RÉVOLUTION

femme le voulut ainsi. Mais en 92, son fils Horace étant né, il le porta lui-même à l’Hôtel de Ville, réclama la loi de l’Assemblée constituante. Ce fut le premier exemple du baptême républicain.

Le plus touchant souvenir de toute la Révolution est celui de son grand écrivain, le bon et éloquent Camille, de sa charmante Lucile, de l’acte qui les mena tous deux à la mort (et auquel elle contribua très directement), la proposition si hardie, en pleine Terreur, d’un Comité de clémence.

Pauvre, disons mieux, indigent en 89, peu favorisé de la nature sous le rapport physique, et, de plus, à peu près bègue, Camille, par l’attrait du cœur, le charme du plus piquant esprit, avait conquis sa Lucile, jolie, gracieuse, accomplie, et relativement riche. Il existait d’elle un portrait, unique peut-être, une précieuse miniature (collection du colonel Maurin). Qu’est-elle devenue maintenant ? dans quelles mains est-elle passée ? Cette chose appartient à la France. Je prie l’acquéreur, quel qu’il soit, de s’en souvenir, et de nous la rendre. Qu’elle soit placée au Musée en attendant le musée révolutionnaire qu’on formera tôt ou tard.

Lucile était fille d’un ancien commis des finances, et d’une très belle et excellente femme qu’on prétendait avoir été maîtresse du ministre des finances Terray. Son portrait est d’une jolie femme d’une classe peu élevée, comme le nom en témoigne : Lucile Duplessis Laridon. Jolie, mais surtout mutine ; un petit Desmoulins en femme. Son charmant petit visage ému, orageux, fantasque, a le souffle de la France libre (le beau pamphlet de son mari).