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Un seul point est louable, c’est que généralement elles la gardent assez bien (et mieux que les hommes ne croient). Elles veulent qu’elle arrive au mariage vierge, neuve, ignorante même, s’il est possible, et que le mari soit charmé de la trouver à ce point petite fille. Et, en effet, cela l’étonne (lui qui n’a vu que des femmes perdues) au point qu’il la croit hypocrite.

Cette ignorance est cependant très naturelle sous une mère inquiète et jalouse, surtout si l’enfant n’a pas eu de jeunes amies qui l’aient instruite. Mais il y a danger à ignorer tout ; l’innocente est exposée par cela même à plus d’un hasard. La mère devrait l’éclairer, l’avertir, du moment qu’elle devient femme. C’est du moins son plus sacré devoir de l’initier parfaitement avant le mariage, de sorte qu’elle sache bien d’avance ce qu’elle va consentir et subir.

Nul consentement n’est libre ni valable qu’en chose connue d’avance.

Sait-elle bien le matin ce qu’elle promet pour le soir ? Est-elle là une personne consultée, ou une chose livrée ? Sait-elle, surtout, le droit exorbitant que va prendre l’époux de se constituer (sur un signe douteux) le juge de son passé moral, de sa bonne conduite, de sa pureté, de sa vertu ?


Elle n’est pas mieux préparée physiquement que moralement. On s’occupe trop de la robe, pas assez de la fille. Père, mère, amies et le fiancé même, tous dans l’agitation de vains préparatifs et de mille riens, négligent précisément celle qui semble le but de tout.