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Sprenger, son affreux Manuel et ses dominicains, fut dit par un légiste de Constance, Molitor. Il dit cette chose de bon sens, qu’on ne pouvait prendre au sérieux les aveux des sorcières, puisqu’en elles, celui qui parlait, c’était justement le père du mensonge. Il se moqua des miracles du Diable, soutint qu’ils étaient illusoires. Indirectement les rieurs, Hutten, Érasme, dans les satires qu’ils firent des idiots dominicains, portèrent un coup violent à l’Inquisition. Cardan dit sans détour : « Pour avoir la confiscation, les mêmes accusaient, condamnaient, et à l’appui inventaient mille histoires. »

L’apôtre de la tolérance, Chatillon, qui soutint, contre les catholiques et les protestants à la fois, qu’on ne devait point brûler les hérétiques, sans parler des sorciers, mit les esprits dans une meilleure direction. Agrippa, Lavatier, Wyer surtout, l’illustre médecin de Clèves, dirent justement que, si ces misérables sorcières sont le jouet du Diable, il faut s’en prendre au Diable plus qu’à elles, les guérir et non les brûler. Quelques médecins de Paris poussent bientôt l’incrédulité jusqu’à prétendre que les possédées, les sorcières, ne sont que des fourbes. C’était aller trop loin. La plupart étaient des malades sous l’empire d’une illusion.


Le sombre règne d’Henri II et de Diane de Poitiers finit les temps de tolérance. On bride, sous Diane, les hérétiques et les sorciers. Catherine de Médicis, au contraire, entourée d’astrologues et de magiciens, eût voulu protéger ceux-ci. Ils multipliaient fort.