Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/334

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à le nommer du petit nom de Verdelet, Joli-bois, Vert-bois. Ce sont les lieux favoris de l’espiègle. À peine eut-il vu un buisson, qu’il fit l’école buissonnière.


Ce qui étonne, c’est que du premier coup la Sorcière vraiment fit un être. Il a tous les semblants de la réalité. On l’a vu, entendu. Chacun peut le décrire.

Les saints, ces bien-aimés, les fils de la maison, se remuent peu, contemplent, rêvent ; ils attendent en attendant, sûrs qu’ils auront leur part d’Élus. Le peu qu’ils ont d’actif se concentre dans le cercle resserré de l’Imitation (ce mot est tout le moyen âge). — Lui, le bâtard maudit, dont la part n’est rien que le fouet, il n’a garde d’attendre. Il va cherchant et jamais ne repose. Il s’agite de la terre au ciel. Il est fort curieux, fouille, entre, sonde, et met le nez partout. Du Consummatum est il se rit, il se moque. Il dit toujours : « Plus loin ! » — et « En avant ! »

Du reste, il n’est pas difficile. Il prend tous les rebuts ; ce que le ciel jette, il ramasse. Par exemple, l’Église a jeté la Nature, comme impure et suspecte. Satan s’en saisit, s’en décore. Bien plus, il l’exploite et s’en sert, en fait jaillir des arts, acceptant le grand nom dont on veut le flétrir, celui de Prince du monde.

On avait dit imprudemment : « Malheur à ceux qui rient ! » C’était donner d’avance à Satan une trop belle part, le monopole du rire et le proclamer amusant. Disons plus : nécessaire. Car le rire est une