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Quelle conclusion supposez-vous à cette enquête ainsi conduite par les intéressés ? la plus inattendue ; et elle fait beaucoup d’honneur à M. Haxthaüsen.

Il ne la résume pas sous forme générale, mais il constate à chaque instant que la culture et le cultivateur sont misérables, qu’ils produisent très peu, que l’homme imprévoyant et sans vue d’avenir est peu capable d’amélioration.

La population augmente, dit-on, rapidement. La production n’augmente pas ; l’activité est nulle. Contraste étrange : la vie se multiplie, et elle semble frappée de langueur et de mort.

Un mot explique tout, et ce mot contient la Russie.

La vie russe, c’est le communisme.

Forme unique, exclusive de cette société, à peu près sans exception. Sous l’autorité du seigneur, la commune distribue la terre, la partage à ses membres, ici tous les dix ans, là la sixième année, la quatrième ou la troisième, même en certains lieux tous les ans.

Au temps ordinaire du partage, la famille qui se trouve réduite par la mort reçoit moins de terre, la famille augmentée en reçoit davantage. Elle est tellement intéressée à ne pas diminuer de nombre que, si un vieillard meurt, le vieux père, par exemple, la famille adopte un vieillard, se fait un père pour remplacer le mort.

La force de la Russie (analogue sous quelques rapports à celle des États-Unis d’Amérique), c’est qu’elle a dans son sein une sorte de loi agraire, je veux dire une distribution perpétuelle de terre à tous