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Par un hasard singulier que je ne regrette nullement, l’éditeur de ma grande Histoire a publié cette année le premier volume de sa réimpression, et dans ce volume la préface où, rendant compte de mes études préalables, j’explique sans restriction mes sympathies pour l’ancienne Allemagne, pour son apôtre Luther, pour ses jurisconsultes populaires, et l’amitié dont m’a honoré leur savant collecteur, Jacob Grimm, esprit très pénétrant, qui comprit bien que, derrière la France académique, officielle, il y en avait une autre, non plus spirituelle, mais candide et profonde.

Mon point de vue était fraternel pour l’Allemagne. Oh ! que je l’ai aimée, cette Allemagne-là, la grande et la naïve, celle des Niebelungen et de Luther, celle de Beethoven, et celle du bon Frœbel et des jardins d’enfants. Mais j’aimais beaucoup moins l’Allemagne ironique de Goethe, l’Allemagne sophistique d’Hegel qui a produit son fatalisme d’aujourd’hui. J’espérais

    au profit de l’armée, des blessés. À cet argent s’ajoutaient des envois de linge, de vêtements. Dans cet hiver qui fut un des plus rudes de ce siècle, nous n’eûmes que nos habits d’été, un feu unique pour déraidir les doigts glacés. Ainsi, M. Michelet à soixante-douze ans, malade, déjà atteint au cœur, s’imposait volontiers les plus rudes privations pour tout envoyer à nos soldats. — A. M.