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Régime. Il avait l’air prêtre, doux, faible, servile. Il n’était pas sans mérite. J’ai vu de lui une lettre religieuse et touchante sur la mort de sa femme. C’était un robin de Grenoble, qui, à l’entrée même de la Révolution, se trompant d’époque, avait acheté la noblesse et un titre de trésorier du roi. Il se sentait vivre par grâce, obligé à faire plus qu’un autre pour mériter cette grâce. C’était le scribe obligé, le commis, la bête de somme. À lui les plus rudes besognes, l’accusation des Girondins, par exemple, qu’il traîna tant qu’il put, jusqu’à ce que les Jacobins furieux lui arrachassent le dossier et se chargeassent de l’affaire. Amar, effrayé, fît alors plus qu’on ne voulait, enveloppant dans la Gironde les soixante -treize que sauva Robespierre. Depuis novembre, il était poursuivi de même pour accuser les dantonistes. On voulait, de l’affaire Chabot, faire un monstrueux filet pour attraper Fabre et d’autres. Les registres témoignent de la résistance d’Amar[1]. Il fuyait le Comité, se cachait chez lui. Les menaces l’en tirèrent. Il marcha tard, sous le fouet, mal, puis mieux, mais jamais bien. Robespierre ne fut jamais content de son rapport contre Fabre.

Toutes choses étaient préparées. On avait un

  1. Lettre du Comité de sûreté à Amar :

    « Nous t’avons envoyé notre collègue Voulland t’exprimer notre impatience sur le rapport que tu nous fais attendre depuis quatre mois. Il nous a annoncé de ta part que tu devais te rendre le soir au Comité Nouveau manquement de parole... Il faut absolument que tu finisses… Tu ne nous forceras pas à prendre des moyens qui contrarieraient notre amitié pour toi. Dubarran, Vadier, Jagot, É. Lacoste, Louis (Il ventôse). » (Archives nationales, registre 640 du Comité de sûreté générale.)