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n’étaient nullement la mort, mais la vie tout au contraire, le profond renouvellement. Aux puissances destructives, aux violentes métamorphoses où vous la croiriez abîmée, échappe, élastique et riante, l’éternelle ironie de la nature.

Telle la nature, telle ma France. Et c’est ce qui fait sa force. Contre les plus mortelles épreuves où périssent les nations, celle-ci garde un trésor d’ironie éternelle.

Nul enthousiasme n’y mord pour longtemps, nulle misère, nul découragement.

Qui fera peur à la France ? Elle a ri dans la Terreur, et elle n’a pas été entamée. Il y avait le rire et les larmes, l’émotion dans les deux sens, nullement la tristesse immobile. L’élasticité morale resta tout entière ; la très utile légèreté du caractère national l’empêche toujours d’être écrasé. Ce peuple n’est jamais véritablement avili, ni profondément corrompu.

Cette légèreté, qui ailleurs est signe de nullité, se trouve ici dans des esprits souvent de grande vigueur. C’est la mobilité du ressort d’acier qui, pour fléchir aisément, n’en est pas moins fort à se relever.

Ce peuple est terrible au fond, redoutable à tous ses dieux.

Le premier conquérant du monde moderne, revenant de la grande défaite, disait, pendant cinq cents lieues : « Du sublime au ridicule il n’y a qu’un pas. »