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croire qu’il ne se mêlait plus de rien, assure qu’en ces derniers temps il faisait des excursions fréquentes dans les environs de Paris, portant sous le bras Gessner, Raynal, Paul et Virginie, et rêvant à la nature. Récits certainement romanesques. Robespierre travaillait toujours et n’avait aucunement ces tendances à la rêverie. Il lisait beaucoup moins d’idylles que de rapports de police, dont sa défiance croissante l’environnait chaque jour ; rapports misérables, à juger par les spécimens que l’on a donnés, propres moins à éclairer qu’à inquiéter, tirailler ; rapports de mouchards qui se font valoir et croient amuser le maître aux dépens des mœurs de tels députés ; rapports de commères bavardes qui dénoncent leurs voisines, etc. : c’étaient là les aliments de l’infortuné Robespierre. Plus le grand, la fameux discours, incessamment écrit, récrit. Il l’emportait à la campagne, s’enfermait dans un lieu sûr, s’absorbait dans le travail littéraire, effaçait et refaisait, polissait, améliorait et filait ses périodes.

Cette toile de Pénélope n’était pas près de finir, si la crise ne l’eût forcé de l’apporter telle quelle. Il l’eût amenée certainement à une forme plus concentrée, moins décousue.

Cette œuvre, comme il arrive aux choses trop travaillées, a le défaut grave de se composer de morceaux, plusieurs au reste éloquents, mais qui s’adressent à l’avenir plus qu’à la Convention, et qui diminuent l’efficacité du discours comme chose politique et pratique.