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ses haines lui auraient permis de revenir en arrière, il avait mis dans les cœurs une si incurable défiance qu’entre lui et bien des hommes il n’y avait de traité que la mort. Les représentants des missions de 1793 étaient revenus sur leurs bancs poursuivis par des millions d’accusateurs qui, derrière, poussaient Robespierre, lui constituaient bon gré mal gré une royauté judiciaire, lui dressaient un trône de fer pour juger la Convention.

Lui-même d’ailleurs, né monarchiste, comme la France de l’Ancien-Régime, entraîné (mais assez tard) vers l’idéal républicain, l’état des mœurs, la corruption, la discorde, l’avaient déjà découragé. Il doutait, pour le moment, du gouvernement collectif ; il le rejetait du moins dans l’avenir, ne croyait pas que le pays pût se guérir sans l’intervention spéciale d’un médecin unique qui lui appliquerait les sévères remèdes dont il avait besoin. Ses amis, aidés ainsi par les circonstances, avaient réussi enfin à le convertir à la dictature. Elle lui apparaissait comme un mal nécessaire. Pour l’asseoir, cette dictature, il fallait d’abord renverser les dictateurs existants, je veux dire Carnot pour la guerre et Cambon pour les finances, enfin les deux comités.

Donc nulle paix n’était possible. « Que demandez-vous ? » dirent-ils. À cela il ne pouvait répondre ; il eût dit, s’il eût été franc : « Vos têtes d’abord. »

Il ne pouvait que leur nommer celles qui devaient tomber dans la Convention. Quelles étaient-elles ?