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On y dépouillait les corps en plein air et sous le ciel, pour envoyer les habits à la rivière, de là aux hospices. Les employés qui verbalisaient demandent à la Commune (lettre du 21 messidor) qu’elle leur bâtisse au moins une petite échoppe en planches ; car le vent éteint la lumière ; ils restent en pleines ténèbres avec leurs guillotinés, au préjudice réel de la chose publique ; les dépouilles, dans ce cas, peuvent disparaître dans l’ombre.

Du 4 au 21 messidor (23 juin-12 juillet), une première fosse fut pleine. La Commune en fit creuser une seconde, une troisième. Le mécontentement du faubourg était extrême, et non sans cause. Le sang inondant la place, on n’avait su d’autre remède que de creuser un trou de une toise en tous sens où il tombait. Le terrain, dur et argileux, n’absorbait rien : tout se décomposait là. Affreuses s’étendaient au loin les émanations. On couvrait ce trou de planches ; mais cela n’empêchait pas que tout ce qui se trouvait sous le vent, de quelque côté qu’il soufflât, ne sentît, à en vomir, cette odeur de pourriture.

« Que serait-ce, dit Poyet, l’architecte de la Ville chargé d’examiner la chose, si ce foyer d’infection s’étendant se confondait avec celui qui se forme aux fosses mêmes qui en sont peu éloignées ? » Il proposait que le sang fût reçu dans une brouette doublée de plomb, et qui, chaque jour, après l’exécution, serait emportée.

La situation du faubourg n’était pas rassurante