Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/35

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pierre, mais aux hommes que Robespierre inquiétait le plus, aux membres impartiaux du Comité de salut public. Barère, Lindet, Carnot, Prieur, d’accord en ceci avec la partie indépendante de la Montagne, craignaient que les violents, délaissés de Robespierre, ne se ralliassent à l’homme qui avait donné les gages les plus terribles contre tout retour, et, pour leur sûreté, ne créassent une dictature de terreur contre la royauté de clémence et d’hypocrisie.

Ces grands organisateurs, qui, à ce moment, par des travaux incroyables, recréaient la France, de concert avec Cambon et quelques représentants modestes et laborieux, se voyaient avec douleur arracher des mains leur œuvre, et la Patrie tout à l’heure replongée dans le chaos.

Pouvaient-ils, comme le voulait Desmoulins, renoncer aux moyens de terreur ? C’eût été renoncer aux réquisitions provisoires que la Terreur seule donnait. Sans elle, avec quoi auraient-ils nourri, vêtu, équipé leurs douze cent mille soldats ?

Carnot, Lindet, nullement terroristes, aimaient peu les Jacobins. En attendant, ils vivaient des réquisitions frappées par les comités, jacobins. Ils aimaient peu Collot, Billaud, et n’en étaient pas moins forcés de se serrer contre eux, pour faire équilibre à la pesante trinité dictatoriale.

S’ils brisaient les agents de terreur, les armées mouraient de faim, la République périssait. Et s’ils les laissaient aller, ces agents aveugles comblaient