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la revanche royaliste, la Terreur blanche et ne se réfugiassent sous le canon de Collot d’Herbois.

Il arrivait en hâte de Lyon. Ses amis criaient : « Voici venir le géant ! »

Pourquoi cet effet fantasmagorique ? Et comment Collot, jusque-là de taille ordinaire, apparaissait-il ainsi ?

Trois choses le grandissaient.

Il envoyait devant lui, contre la religion de Robespierre, un bien autre dieu, fétiche effroyable, la tête même de Chalier, cette tête brisée trois fois par le couteau girondin.

Devant lui marchait aussi le bruit, la terrible légende des prisonniers foudroyés aux Brotteaux. On sentait assez qu’un si rigoureux exécuteur de la vengeance nationale ne se réservait pas de porte de derrière et ne composerait pas avec les politiques qui spéculaient sur l’amnistie.

Une chose tomba comme un pavé sur la tête de ceux-ci. L’ami de Chalier, son vengeur, ce fameux Gaillard, qui, sortant de son cachot, le 19 octobre, avait été si froidement reçu des Jacobins, tomba dans le désespoir au premier bruit de l’amnistie, crut la République perdue et se brûla la cervelle.

Collot d’Herbois lui prête ces paroles, non sans vraisemblance : « Je ne suis pas un homme faible, je n’ai point pâli devant les poignards. Mais je meurs, ô Jacobins, d’être abandonné de vous. »

Collot, monté sur Chalier, monté sur Gaillard, arrivait géant. Il faisait peur non seulement à Robes-