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L’Assemblée ne réclama pas contre cette logique et révoqua de bonne grâce. Menaçante pour la France, la loi n’atteignait plus du moins la représentation nationale ni l’existence même de la République.

Cependant, pouvait-on croire qu’un tel homme, s’étant avancé si loin et s’étant vu condamné à ce mensonge évident, ne chercherait pas une autre arme ? La loi manquant, qui l’empêchait de recourir à la force, quand il tenait Paris par Henriot et Payan, quand l’agent même des comités, le chef de la police armée, Héron, prenait l’ordre de lui ? Un nouveau 31 mai lui eût été trop facile. Ses adversaires étaient morts, s’il savait vouloir un seul jour.

L’attaquer en ce moment, c’était une audace insensée. Tout le monde haussa les épaules, quand Lecointre, toujours absurde autant qu’intrépide, montra le 24 prairial à ses amis de la Montagne l’acte d’accusation de Robespierre tout dressé et prêt.

Lui-même le sut le lendemain et n’y fit nulle attention. Il connaissait sa forte base et ses profondes racines. Une attaque légale était impossible[1].

Pour l’attaquer en dessous et miner sa réputation, c’était chose dangereuse et longue. Quel moyen de ruiner tout à coup ce que tant d’années avait élevé, ce colosse de réputation ? On savait trop ce qu’il en avait coûté à Desmoulins, à Fabre d’Églantine. On ne

  1. Déjà, en avril ou mai, un nommé Ferai proposait au Comité de faire le procès de Robespierre ; il offrait de prouver qu’au procès des hébertistes on avait supprimé les traces des rapports de Robespierre avec eux. Lindet lui dit : « Robespierre est encore trop fort. Nous le guettons. Il creuse son tombeau. » (Papiers manuscrits de Robert Lindet.)