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Paris, c’était un miracle, un vrai coup du ciel. Je n’en connais qu’un exemple.

Le 25 pluviôse 1794, on dénonça à la Convention un huissier (du district de la Souterraine, département de la Creuse), lequel, cumulant dans son village les fonctions de maire et de membre du comité de surveillance, exerçait sur les paysans une terreur lucrative, étonnamment audacieuse. Il les emprisonnait et les rançonnait à quatre cents, cinq cents, six cents livres par tête. Il leur vendait des exemptions de la réquisition. Il les faisait travailler à son profit par corvée sur un bien national dont il s’était fait fermier. Il les fit contribuer pour acheter des blés dans un moment de disette, puis, ces blés, les leur vendit trente sous plus cher par boisseau qu’ils ne lui avaient coûté. Ce tyran, à l’exemple des anciens seigneurs, mariait à sa volonté. Un homme qu’il mit en prison n’en sortit qu’en épousant une fille qu’il lui imposa. Le curé voulait se marier, il ne le permit pas, et, pour plus de sûreté, il enferma la fiancée, puis la bannit de la commune.

Ce qui le rendait si hardi, c’est qu’à bon marché il s’était fait un renom de patriotisme en célébrant avec éclat l’abolition de la féodalité. Pour la fête, il avait levé une somme énorme de deux mille quatre cents livres, et coupé dans les forêts de l’État cent cordes de bois dont il fit un feu de joie sur une montagne voisine.

On se plaignit au district. Mais un des adminis-