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suivit en Fouché, et qui eût atteint Gollot sans le 9 thermidor.

Le président n’était plus le louche et perfide Herman. C’était Dumas, violent, furieux robespierriste, qui jugeait pistolets sur table. Il insultait les accusés, méprisait si outrageusement toute forme de justice qu’il fit passer un juré (Renaudin ) au rang des témoins ; puis, quand il eut témoigné, il revint au banc des jurés, se refaisant ainsi juge de son propre témoignage.

Le seul des accusés qui montra un grand courage fut Lucile Desmoulins. Elle parut intrépide, digne de son glorieux nom. Elle déclara qu’elle avait dit à Dillon, aux prisonniers, que si l’on faisait un 2 septembre, « c’était pour eux un devoir de défendre leur vie ».

Il n’y eut pas un homme, de quelque opinion qu’il fut, qui n’eût le cœur arraché de cette mort. Ce n’était pas une femme politique, une Corday, une Roland ; c’était simplement une femme, une jeune fille, à la voir, une enfant pour l’apparence. Hélas !… qu’avait-elle fait ? voulu sauver un amant ?… Son mari, le bon Camille, l’avocat du genre humain. Elle mourait pour sa vertu, l’intrépide et charmante femme, pour l’accomplissement du plus saint devoir.

Sa mère, la belle, la bonne Mme Duplessis, épouvantée de cette chose qu’elle n’eût jamais pu soupçonner, écrivit à Robespierre, qui ne put ou n’osa y répondre. Il avait aimé Lucile, dit-on,