Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/240

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

adoré ou battu ; mais il ne se discute pas, il ne se remplace pas.

Robespierre remplaça Chaumette par un homme de grand mérite, plein d’esprit, de feu, le méridional Payan. Tout fut inutile. Le peuple ne mit plus les pieds à l’Hôtel de Ville. La nouvelle Commune eut beau payer les mendiants. Cela ne réussit pas mieux. La foule décidément avait pris un autre chemin.

Rien ne remplaça jamais l’ancienne Commune, Pache, Hébert, Chaumette. Hébert même était populaire, quoique muscadin (portant deux montres à sa culotte) ; Paris était habitué à entendre de bonne heure la gueule infernale de ses colporteurs : « Il est b… en colère, ce matin, le Père Duchesne ! » Le maire Pache était populaire par sa bonne représentation, son apparente honnêteté, sa calme et large face suisse. Chaumette était populaire par je ne sais quoi de bonhomme, par ses cheveux plats, luisants, exactement divisés, par ses trivialités et ses apophtegmes. Rarement, très rarement il ceignait l’écharpe. Il était peuple dans le peuple. Ses textes ordinaires, la guerre aux jeux et aux filles, ses exhortations banales d’être bon époux, bon père, etc., tout était fort bien reçu. Il ne bougeait de la Commune, sauf pour prêcher aux Filles-Dieu. Il vivait là, infatigable, dans la grande salle Saint-Jean, au milieu d’une foule bruyante qui se renouvelait sans cesse, doux, poli, facile ayant toujours la réponse, trouvant toujours sans se lasser les