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reur quand il lut, en épreuve, ces lignes terribles. Il se crut mort, déclara qu’il hasarderait d’imprimer tout ce qui était anti-hébertiste, mais que tout passage contre Robespierre devait disparaître. L’ardent et fougueux écrivain, arrêté dans son élan, se débattit, disputa. Les épreuves allaient et venaient ; on les lisait au passage ; les amis en parlaient tout bas. Les ennemis en surprirent-ils quelques pages ? C’est probable. Du reste, le bruit suffisait. L’effet du factum eût été terrible. C’était à Robespierre à voir s’il devait attendre le coup.

Tout grand homme politique doit craindre d’être touché de près. Mais combien plus Robespierre, un prêtre, une idole, un pape ! Le plus digne ne peut jouer ces rôles étranges qu’avec un masque mobile à plusieurs visages. Celui-ci, sérieux, patriote, acceptait cette adoration pour le salut de la patrie et croyait qu’elle périssait si les voltairiens touchaient encore à cette dernière religion.

De hasarder la parole contre Desmoulins, il n’y avait pas à y songer. Un dieu qui discute est perdu. Robespierre, d’ailleurs, n’avait qu’une corde, sérieuse et triste. Il était sans armes contre l’ironie. Ses excursions en ce genre n’étaient pas heureuses. Il croit mordre Phelippeaux en disant que ses philippiques « ne sont que des philippotiques ».

Il ne pouvait plaisanter Desmoulins, mais bien le tuer.

Nous ne doutons aucunement qu’il n’ait été terrifié, la première fois que cette idée cruelle lui vint à